Chemin de croix

Messages : 5 Date d'inscription : 13/10/2009

Habillé en civil... il déteste ça. Mais le prophète lui-même ne devait-il pas cacher sa vraie nature aux yeux des autres? Si. Lui n'avait pas d'accoutrement ridicule, par contre. Pas de pantalon tenu par des bretelles grossières, pas de chemise trop grande, et pas de chaussures bariolés. En bref, pas un siècle vestimentaire de retard. Non, vraiment, s'afficher avec ce déguisement est loin d'être à son goût.

Pourtant, il est conscient de l'ampleur de la tâche qui lui a été confiée, et c'est donc avec un air des plus révérencieux qu'il longe les ponts d'embarquement, un épais sac à la main. Son identité. Monseigneur Cornelius a été très clair à ce sujet: pas avant d'être à bord. Soit, tout restera bien rangé.

Entre les ponts 9 et 10, il s'arrête. Un pilier trône, comme dans les textes sacrés... se pourrait-il que ce soit... non, tout simplement impossible, des centaines de fidèles l'ont cherché avant lui sans succès. Ce serait trop simple, trop évident, mais déjà il marche. Quelques pas lents et mal assurés. Des souvenirs des écrits... sûr de soi, il faut être sûr de soi. Il trottine maintenant, faciès déterminé, le regard fixé sur l'objectif.

Ce n'était pas le passage. Rien n'ébranle la foi, mais le métal et la pierre peuvent ébranler un homme. Surtout s'il est en pleine course. Il faut plusieurs minutes avant que le père Cristobal, le plus jeune prêcheur de la Sainte parole, ne se relève, et bien d'autres pour qu'il reprenne pleinement ses esprits. Un regard à gauche, à droite, en arrière... il semble que personne n'ait assisté à cette démonstration d'orgueil mal placé. Particulièrement honteuse de surcroit.
Comme le prophète, il doit se relever plus fort et poursuivre sa quête. Sa mission, peut-être la plus importante depuis la création de l'Ordre. Le IIè siècle après HP sera celui de l'épanouissement, grâce à lui. Il se remet donc en route, vers le vaisseau, vers sa destinée... vers l'infirmerie la plus proche, une injection fera disparaitre cette douleur insoutenable.

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Cyber-monastère de l'Ordre, Londres, six mois plus tôt:

"…Harry leva les yeux et vit une larme couler sur le visage de Dumbledore puis disparaître dans sa longue barbe argentée."

Avant que le prêtre ne puisse reprendre son sermon, un jeune homme vient l’interrompre. Le teint blême, il semble appeuré et balbutie quelques mots difficilement compréhensibles :

Mon père… le… le… Monseigneur Co…Cornelius est ici, il… demande à vous voir.

Le silence retombe. Bien que son visage ne laisse rien paraître, le prêtre est profondément troublé. Il n’a jamais eu aussi importante visite, et n’en voit pas la raison. Il parle à son tour, à voix basse.

Faites le patienter encore un instant.

Le moine reparti, il reporte son attention sur l’assemblée.

- Mes frères, il me faut écourter le service. Demain, même heure… qu’Albus vous protège.
- Hagrid.

Un dernier regard bienveillant à l’œil unique, et il coupe la webcam. Une technologie dépassée, mais qui a ses avantages, comme celui de la discrétion. Puis il se lève et d’un pas raidi par l’appréhension, il quitte le bureau.
Dehors, un vieillard l’attend, arborant la robe des directeurs. Les deux hommes se regardent un instant, portent une main à leur front et y dessinnent du doigt un « z » invisible.

- C’est un honneur, Monseigneur.
- Laissons les formules où elles sont, Cristobal. J’ai à vous parler.
- Bien… entrez.

Le vieil homme passe la porte de sa démarche mal assurée, suivi de près par Cristobal. Ils n’en ressortent qu’une longue heure plus tard, et le jeune prêtre ne cache plus son anxiété.

- Rappelez-vous, vous avez six mois pour vous préparer. Et une fois là bas, pour le bien de tous, il serait bon que vous réfréniez vos pratiques. Les femmes rousses ne sont pas toutes des descendantes de sainte Ginny. L’avenir du culte en dépend.
- Cela n’arrivera plus, Monseigneur.
- Parfait.

Et sans un mot de plus, il s’éloigne. Cristobal reste sur le pas de la porte, un mélange de peur et d’excitation lui tiraillant l’estomac.

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Le souvenir se brouille. Il est temps de partir, maintenant. La poignée du sac toujours serrée dans sa main, il vérifie une énième fois le numéro de la navette avant de s’y engouffrer. Trop tard pour reculer maintenant. Et ce mal de tête qui n’en finit pas…